Du commerce continental…

 

 

 

Extraits de l’intervention de Paolo De Madeira, professeur émérite d’économie et commerce continentaux à l’université de Brizio, An 187 :

 

 

" Il arrive fréquemment que les explorateurs découvrent des Ecrins dans lesquels se sont installés des populations que je qualifierais d’hostiles. Ces civilisations refusent de voir leur territoire traversés par des Routes commerciales, et par conséquent toutes relations avec ses Ecrins s’avèrent difficile, voire impossibles. Toutefois, la plupart des Guildes emploient des spécialistes, Diplomate et autre Prince-Marchand, qui, parfois, parviennent à tisser quelques liens. C’est ici que se situe le cœur de mon propos. Face à des civilisations réticentes à mettre en place des relations avec les Natifs, nous avons dû faire de nombreuses concessions. Là où s’installent consulats et comptoirs dans un Ecrin ami, nous nous contentons dans des Ecrins hostiles d’un ensemble appelé fundeq.

Le premier établissement de ce type remonte pratiquement aux premières années de découverte de Continent. Au cours de l’an 23, l’expédition d’une guilde majoritairement Felsin est entré en contact avec un Ecrin hostile. Le roi de cet écrin désertique refusa la présence permanente de Natifs sur les terres qu’il contrôlait. Or, le désert regorgeait de mines, et Hasan Zerk, le chef de l’expédition parvint à sceller un traité avec le monarque. Ce traité fut conservé par la Guilde De Zerk et servi de modèle pour les autres Guildes. Document fort intéressant, j’ai en effet, eu l’occasion de l’étudier…Le roi acceptait donc que des marchands séjournent pour une durée limitée dans la capitale de son état, un port, afin de traiter des affaires commerciales. Concrètement le fundeq est un entrepôt-hôtel, tous les établissements de ce type dont nous avons connaissance se situent dans des ports qui constituent les seules portes de sortie d’Ecrins fermés. Les marchands étrangers y séjournent le temps de vendre leurs marchandises et d’en acheter d’autres, et ce, pour une durée légale qui fut fixée à quatre mois, mais elle peut varier selon les termes du traité passé entre les Natifs et la civilisation continentale concernée. Le fundeq proprement dit, la bâtisse, se présente comme ceci : c’est un grand édifice carré ou rectangulaire, plus rarement rond ou ovale, disposé autour d’une cour centrale. Il possède toujours un étage et ses dimensions sont variables. Il s’organise de la façon suivante : sur un des côtés est percée l’unique porte donnant sur l’extérieur, souvent sur les quais, cette porte est en général assez grande pour laisser passer les véhicules encombrants. Au centre de la cour se trouve une fontaine, un four et une forge. Le rez-de-chaussée est occupé par les entrepôts et les boutiques des différentes Guildes présentes. Une boutique va de pair avec un entrepôt. . Le premier étage quant à lui est voué aux habitations. Il faut toutefois noter que certaines Guildes, très puissantes, parviennent à obtenir un fundeq particulier. Il va sans dire que cela est très rare et que seules des guildes très riches peuvent se permettre ce genre de transactions… Je citerais en exemple le fundeq assez récemment ouvert dans un Ecrin Lore non loin de Port-Lilian par la Guilde de Rubisque que j’ai eu l’occasion de visiter. Entièrement construit de pierres et de bois, il mesure 50 mètre sur 100. La façade mesure 50 mètres de côté et est percée d’une arche de 10 mètres de large sur 4 de haut. Chaque boutique ou entrepôts est un carré de 10 mètres sur 10, et de 5 mètres de plafond. On dénombre donc 23 pièces entourant une cour de 30 mètres sur 90.

Chaque navire arrivant au port doit faire une demande de location auprès du Consul. Les loyers sont variables, selon la bonne tenue des relations avec l’Ecrin et la richesse des échanges pratiqués. Le Consul recueille l’argent du loyer et en contrepartie fournit un sauf-conduit signé par le Chef de la Douane, nous reviendrons sur ce personnage important. Le sauf-conduit permet au navire de décharger ses marchandises, qui sont immédiatement stockées dans le entrepôts du fundeq. Il existe une population permanente possédant un statut de résidant, et donc non soumise au séjour de quatre mois : un Consul nommé par le Sénat est chargé des relations avec les autorités locales, un boulanger et un forgeron. On trouve aussi un notaire, un scribe et un interprète qui sont eux chargés de veiller au bon déroulement des opérations commerciales. Ils sont secondés par plusieurs peseurs et porteurs, leur nombre n’excède pourtant pas une dizaine d’individus. Aucun soldat n’a le droit de séjourner dans le fundeq, tout homme armé est cantonné au navire sur lequel il est arrivé, s’il veut quitter le navire pour gagner le fundeq, il doit laisser ses armes à bord. Il est à noter que les Natifs n’ont en aucun droit l’autorisation de quitter le fundeq s’ils ne sont pas accompagnés par un fonctionnaire du pouvoir en place, en général ce dernier est appelé Chef de la Douane par les membres des Guildes. En contrepartie aucun autochtone n’a le droit de pénétrer dans le fundeq sans l’autorisation du Consul ou du chef d’une expédition présent pour écouler ses marchandises (avec là aussi l’aval du Consul). Je reviens quelques instants sur le Chef de la Douane, son nom vient du fait qu’il contrôle conjointement avec le personnel du fundeq les échanges commerciaux et fixe les taxes de sortie des produits, en général 5 à 10 % pour les matières viles comme le bois, la laine ou le cuir et 20 à 50 % pour des articles de luxe, orfèvreries, métaux précieux et autres épices. Par exemple dans l’Ecrin marin de Calendor, les perles géantes sont soumises à une taxe de 50 %. Une perle coûtant prés de 5 000 guilders suivant sa qualité, il faut débourser environ 7500 guilders pour en acquérir une. Je sais de quoi je parle, jeunes gens, je faisais partie de la dernière expédition ayant ramené ces perles sur les Rivages pas plus tard qu’il y a un mois. Enfin, ce personnage est le lien unique entre les Guildes et le pouvoir local. Toute demande d’ambassade, les affaires judiciaires, les litiges commerciaux entre marchands guildiens et autochtones ou entre marchands guildiens sur le territoire de l’Ecrin tombe sous sa juridiction … " 

 

 

" …Il existe différentes formes d’associations permettant l’envoi d’un ou plusieurs navires des Rivages vers le Continent, ou entre différents ports du Continent. L’un des partenaires de ces associations et, bien évidemment et obligatoirement une Guilde. Mais certains accords font entrer des particuliers dans le commerce continental. Je vais ici vous exposer brièvement les deux principales formes d’associations.

La première est une invention Venn’dys. Nous l’appelons Association Marine. Une Guilde, que l’on nommera A, ou un marchand, un particulier s’entend, non lié à une Guilde, finance intégralement un navire et sa cargaison. La guilde A ou le marchand affrète le navire, paie l’équipage et la marchandise. Une Guilde B fournit le navire et l’équipage - le tout payé par le marchand ou la Guilde A, je le rappelle. Au retour du voyage, les bénéfices - ou si cela c’est mal passé, les pertes – sont partagés : un quart pour la Guilde B, trois quart pour le marchand ou la Guilde A. Cette technique est particulièrement prisée par les guildes de moindre importance, c’est à dire soit récemment fondées, soit peu puissantes financièrement, ce qui leur permet de faire du transport à moindre frais. Ce sont les Guildes que j’ai nommé Guilde B. Les Guildes plus puissantes, ou Guilde A, y trouvent aussi leur compte, elles n’ont plus à entretenir des flottes importantes pouvant déléguer les opérations maritimes, cela permet aussi une plus grande flexibilité. Quelquefois, une Guilde B désirant se placer sur une route maritime peut s’engager à hauteur d’un quart dans le financement de l’opération. Le partage des bénéfices se fait alors à hauteur d’un tiers pour ladite Guilde et de deux tiers pour l’autre partie, Guilde A ou marchand.

La seconde technique est d’origine Gehemdal. Elle ne porte pas de nom spécifique ; mais la plupart du temps on la nomme prêt d’Aldébar, du nom de son créateur, ou " tourniquet " en pays Venn’dys. Un particulier ou une Guilde confie des marchandises ou des passagers à une autre personne morale, qui est obligatoirement une Guilde. Cette dernière travaille en fait en sous-traitance, c’est elle qui affrète le navire et l’équipage, contrairement à la société marine. Elle transporte les marchandises dans un port désigné à l’avance. Quelquefois le contrat stipule plusieurs escales, d’où le surnom de " tourniquet ". A l’arrivée dans un port, une fois les marchandises livrées, le capitaine du navire reçoit une somme fixée dans le contrat signé sur les Rivages ou dans un autre port du Continent. Le contrat signé et scellé par le sceau de la Guilde employeuse faisant foi, en plus de la somme, il contient la nature et le nombres des marchandises, ainsi que les ports de départ et d’arrivée voire les éventuelles escales. Le commanditaire de l’opération possède un double afin d’éviter tout litige. L’avantage principal de cette technique est, pour la Guilde transporteuse, de pouvoir embarquer les marchandises de plusieurs guildes, rentabilisant ainsi largement un voyage. Ce contrat est toutefois très risqué pour le transporteur, ce dernier s’engageant à rembourser, en général, la moitié de la valeur des marchandises en cas de perte, de vol ou de naufrage ".